Glaciel
Notes de programme
« …Glaciel prend son point d’assise au moment précis où les glaces du fleuve Saint-Laurent, l’hiver, recouvrent les battures. Afin de vivre le froid, de tendre l’oreille à l’hiver et de renouer avec ma nordicité, j’ai passé trois jours, dehors, sur l’ile d’Orléans à la Pointe d’Argentenay. Glaciel sera donc en trois parties datées, pourvues d’un ancrage journalier.
Le glaciel, un néologisme bien québécois, est un ensemble de glaces flottant sur l’eau. « Le glaciel, on y entre dès qu’on quitte les terres et que l’on trouve des eaux congelées. Il y a des endroits où le glaciel est stable, des endroits où il est dynamique, plus cassé dans le bouscueil, plus régulier sur un lac.(1) » – Louis-Edmond Hamelin
À la Pointe d’Argentenay, j’ai enregistré le craquement des glaces de la batture dans toute la diversité qu’elles m’ont offerte. Au rythme des marées, les rives glacées du fleuve se dynamisent : lorsque la marée monte, l’eau reprend son espace de sous les glaces, l’air s’en échappe et la glace craque et fend ; puis, lorsque la marée redescend, la batture de glace, affaiblie par le passage de l’eau, se repositionne. Cette perturbation cyclique impose une évolution ponctuelle du paysage glaciel.
Pendant mon séjour, j’ai réalisé combien ma réalité montréalaise était loin du fleuve. J’ai aussi pris conscience que la vie urbaine nie la présence de l’hiver – comme si la lenteur du froid était un non-sens en ville.
Glaciel vient d’un désir de nommer la sonorité de l’hiver. L’œuvre est un prolongement chimérique, une augmentation de l’empreinte du temps de trois jours de janvier ; c’est quelques bouts de glace dans l’hivernité imaginaire.
Ce projet n’aurait pu être possible sans la précieuse aide de la Maison de la culture du Plateau Mont-Royal et du Conservatoire de musique de Montréal. Merci au Centre Q pour l’accueil et l’espace.
Un merci tout spécial à Charles-Antoine Fréchette pour le piano, la présence et le regard. »
- Guillaume Primard
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(1) La nordicité du Québec : Entretiens avec Louis-Edmond Hamelin, ouvrage dirigé par Daniel Chartier et Jean Désy, Presses de l’Université du Québec, 2014.