Notes de programme

Heurts, Aspérités et Desseins forment une trilogie dont les trois parties peuvent être interprétées ensemble ou séparément. Toutes trois ont comme matière première des matériaux bruités qu’elles articulent différemment du point de vue énergétique. 

Dans Heurts, je me suis intéressée à la notion de rupture, au moment où se brise l’élan, victime de lui-même ou d’éléments extérieurs. La pièce est une série de tentatives ratées de canaliser une énergie qui nous échappe, exprimées par des sonorités non domestiquées, crues et joyeuses. Je m’y suis inspirée de nos improvisations en duo avec mon ami et collègue Sergio Castrillón.

Aspérités est basée sur la notion de texture. C’est une exploration de l’intérieur du son mettant en lumière le lyrisme sous-jacent des sonorités rugueuses exposées dans Heurts. Les matériaux s’y déploient plus fragilement et plus lentement, invitant à un changement de perspective d’écoute qui permet de percevoir les chants émanant des artefacts sonores — bruits des archets, irrégularité des surfaces, battements, harmoniques résultantes, etc.

Dans Desseins, les matériaux d’Aspérités sont repris, atomisés et développés de manière patiente mais déterminée : tous tendent vers un but commun sans ployer. Leur intention est claire, leurs trajectoires sont définies, mais leurs objectifs sont insaisissables. Tels Sisyphe, les musiciens persévèrent ; ils refont des gestes en boucle, repartent du même point de départ pour tenter de donner un sens à ces éléments décousus et construiront, lentement mais sûrement, un discours à partir de ces bribes.